Pourquoi je consulte... ? Pour aller mieux pardi ! Blague à part : en tant que chanteuse traditionnelle bretonne qui a décidé – il y a maintenant longtemps – que ce serait son métier, mes promenades dans les archives de Dastum sont indispensables.
Pour conforter ou comparer des versions, écouter différentes interprétations d'une même chanson, en trouver de nouvelles pour moi ou pour les faire apprendre. Mais aussi écouter les variations dialectales, où va se nicher la rime d'une même chanson lorsque les parlers diffèrent, les propos des chanteurs face aux collecteurs venus recueillir leur savoir, entendre leur belle langue... Ce bain sonore nourrit considérablement ma pratique pour l'élaboration de différents spectacles, il permet aussi d'illustrer mes propos lors d'interventions auprès de chanteurs apprenants, de leur donner quelques clefs d'une tradition foisonnante à laquelle ils n'ont pas forcément accès au quotidien. Oxford a la Bodleian Library ; nous, Dastum.
Les raisons d'avoir un coup de cœur en écoutant ces archives sonores ont pour moi multiples. Parfois, elles m'évoquent le souvenir d'un parent, d'un proche, d'une situation, d'un monde, d'un moment disparu ; parfois c'est simplement que c'est beau ! Magnifiquement chanté, bien écrit, bien sonné, bien conté. Alors comme il fallait en choisir une et une seule j'ai pris une version entendue il y a peu, d'« Un enig rouz er c'hoed », chantée par Rosalie Le Paboul et enregistrée en 1961 par son fils Jude Le Paboul. Parce que c'est en lui chantant cette chanson droit dans les yeux, qu'il y a plus de cinquante ans, mon père a définitivement séduit ma mère ! Et l'idée d'être le fruit d'une chanson me plaît plutôt pas mal…
Nolùen Le Buhé (photo Véronique Le Goff).